SÉÏSME en HAÏTI - 12 JANVIER 2010
HOMMAGE de la COMMUNAUTÉ des FRÈRES LAMENNAIS lu parle frère Jean Yves HAMON lors de la cérémonie commémorative.
On peut lire dans notre Règle de vie : « Certains Frères reçoivent de Dieu, par l'Esprit-Saint
qui distribue les charismes comme il lui plaît, un appel précis à l'apostolat missionnaire. »
Frère Joseph était de ceux-là. Né à Saint-Renan en 1940, il arrive en Haïti en 1965, après
avoir enseigné quelques années au collège Saint-Louis de Châteaulin et au collège du Sacré-
Coeur de Lesneven. C'était après son service militaire à Djibouti et sa profession perpétuelle.
Trois ans plus tard, en 1968, il revient au pays pour des études en sciences physiques et
chimie à Brest, il réside alors à Milizac. En 1972, il regagne Haïti, d'où il n'est revenu que pour
ses congés et pour l'année de rénovation à Rome en 1980.
Joseph a vécu l'essentiel de son existence en Haïti, non seulement si l'on considère le nombre
des années, mais surtout en ce sens que toute sa vie religieuse a été marquée par son
appartenance à la Province d'Haïti : il a vécu, non seulement en Haïti, mais pour Haïti. Comme
le dit la Règle de vie des Frères, « la vocation missionnaire suppose certaines dispositions
naturelles et des aptitudes appropriées, telles que : une large ouverture d'esprit et de coeur
pour admettre les autres comme différents et les aimer comme tels ;une faculté d'adaptation
aux habitudes de penser et de vivre propres au pays d'adoption ; un don de sympathie qui
facilite les relations avec la population locale et les autres missionnaires ; un esprit d'initiative et
de créativité réclamé par l'originalité et la complexité des situations. »
Frère Joseph a incarné ces dispositions. Frère Serge Larose, l'a dit en 2007 lors des 50
ans de vie religieuse : Frère Joseph était une personnalité attachante, sa compagnie était
agréable. Son sens du compromis lui permettait de simplifier les problèmes compliqués. Son
humour favorisait un climat de détente et de sérénité en communauté. Dès son arrivée en
Haïti, Frère Joseph s'est ouvert à tout ce qui concernait son pays d'adoption, il s'est beaucoup
intéressé à l'histoire et à la littérature haïtiennes, il aimait aussi le cinéma et la photographie.
Frère Joseph a surtout exercé son activité à Port-au-Prince : dans l'enseignement, bien sûr,
mais aussi dans diverses activités apostoliques para et périscolaires, animant par exemple la
troupe scoute de Saint-Louis de Gonzague. En 1974, il devient directeur du juvénat, avant d'être
nommé économe de Delmas en 1976, puis supérieur-économe à la Rue du Centre en 1983.
On le retrouve à nouveau économe à Delmas en 1986, et à Pétionville, comme économe
provincial, en 2003.
Connu pour sa gestion rigoureuse et ordonnée, à la fois ferme et souple, travailleur infatigable et
toujours disponible, estimé des enseignants et des personnels de service, Frère Joseph est
demeuré le plus longtemps possible, ne serait-ce que quelques heures par semaine,
professeur et éducateur. Il a constamment cherché à adapter son enseignement à son
auditoire, rédigeant des documents appréciés, non seulement en chimie et en mécanique, mais
aussi en catéchèse, pour les secondes notamment, avec un cours remarqué sur les Evangiles,
cours qu'il renouvelait sans cesse pour tenir compte des recherches en ce domaine.
Si Frère Joseph a toujours été soucieux d'apprendre et de se perfectionner dans le secteur
des sciences, c'est surtout dans le domaine de la modernisation informatique que la Province
d'Haïti lui doit beaucoup. Ayant tout appris par lui-même, devenu expert en la manière, il était
sollicité de partout pour des conseils, des réparations, des achats, permettant ainsi aux divers
établissements mennaisiens, et à bien d'autres, d'être, en informatique, à la pointe de la
modernité. Cette haute compétence s'accompagnait d'une grande modestie. L'ouverture
d'esprit de Frère Joseph se retrouvait aussi dans le domaine spirituel, religieux et théologique.
Grand lecteur, il était au courant des dernières parutions qui présentaient quelque intérêt
pour lui permettre de traduire la foi dans les mots d'aujourd'hui, pour nourrir sa vie religieuse
et pour approfondir sa relation au Christ, à qui il a donné toute sa vie, dans le service des
enfants et des jeunes.
A la communauté de Landerneau, où nous le recevions volontiers pendant une partie de ses
congés, nous apprécions sa gentillesse, son humour, sa joie de vivre. Les conversations que
nous avions avec lui nous permettaient d'entrevoir la complexité de la situation vécue en
Haïti : dans ses propos, l'espoir d'un avenir meilleur se mêlait à la lucidité et au réalisme qui le
caractérisaient. Frère Joseph était conscient des difficultés de la tâche. Mais rien ne semblait
faire obstacle à sa générosité et à son désir de donner le meilleur de lui-même, dans la
mission qui était la sienne et celle des Frères.
Frère Joseph a donné sa vie pour Haïti. Il a partagé jusqu'au bout le destin du peuple haïtien
qui était devenu le sien. Solidaire des Haïtiens dans sa mort comme dans sa vie, il repose
maintenant en terre haïtienne, comme le grain de blé dans l'attente de la résurrection, la sienne
et celle du peuple haïtien. Avec saint Paul, nous croyons que Dieu nous conduit à travers
ombres et lumière. « Nul ne vit pour soi-même, nul ne meurt pour soi-même. Dans notre vie
comme dans notre mort, nous appartenons au Seigneur ». Que la mort de Frère Joseph et
celle de milliers d'hommes, dé femmes et d'enfants portent beaucoup de fruit … de paix, de
justice et de fraternité !
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