SÉÏSME en HAÏTI - 12 JANVIER 2010
HOMMAGE de la FAMILLE à JOSEPH lu par ses neveux lors de la cérémonie commémorative.
Joseph aurait eu 70 ans cette année, et s’il était retraité, il restait actif pour la congrégation
en assurant des fonctions d’économe. Il demeurait tourné vers l’avenir mais aujourd’hui,
son départ soudain nous force à nous tourner vers le passé, pour nous remémorer les
instants que, les uns les autres, nous avons pu partager avec lui.
Ainé des 4 frères, il a été le premier a fréquenter les frères de l’institution chrétienne à St
Renan, et il a placé la barre très haut pour les suivants tant il a démontré de qualité et
d’investissement, au point que le directeur de l’Ecole a invité ses parents à l’orienter vers
le Juvénat du Folgoët avant de suivre l’enseignement des frères de Ploermel. Le décès
de sa mère alors qu’il n’avait que 13 ans, loin d’ébranler ses convictions religieuses, les a
définitivement renforcées.
Après son service militaire à Djibouti, il est parti pour Haiti, en 1968, en qualité de frère
enseignant dans les matières math-physique-chimie. Depuis cette date, sa volonté d’aider
la jeunesse haitienne à s’extraire de sa condition grace à l’éducation et l’enseignement ne
s’est jamais tarie. Au delà de l’enseignement des sciences, il dispensait une éducation
religieuse aux élèves qui grandissait ainsi autant dans leur foi que dans leur savoir. Il
aura passé 42 ans auprès du peuple haitien, revenant en France tous les 4 ans pour des
vacances toujours trop brèves au goût de sa famille.
Lors de ses retours en France, il partageait son temps entre ses frères et en profitait pour
revoir les autres membres de la famille, oncles, tantes, cousins, cousines, neveux et
nièces. Cela faisait beaucoup de monde à voir bien sûr mais il avait une attention pour
chacun et il y avait tant de tendresse dans sa main qui nous tapotait chaleureusement
l’épaule lorsqu’on se retrouvait. Il n’oubliait pas pour autant la vie en communauté avec les
frères de la métropole et se ménageait toujours le temps, pendant ses vacances, pour
effectuer une retraite dans le recueillement et la prière.
Lorsqu’il repartait pour Haiti, chacun avait le coeur serré de devoir attendre encore si
longtemps pour partager sa bonne humeur et son écoute. Il avait ce don d’ouverture aux
autres qui lui permettait d’écouter sans jamais juger, de conseiller sans rien imposer, de
rire avec nous sans jamais se moquer. Si on devait lui trouver un défaut, pour rééquilibrer
un peu la balance, on pourrait dire qu’il était têtu, mais pour un Bergot, c’est naturel et, de
surcroit, pour un breton c’est là encore une qualité.
Même si nous déplorions son retour en Haiti, nous étions tous très fiers de son
engagement là bas.
Si certains d’entre nous ont pu espérer un temps qu’une fois arrivé l’âge de la retraite,
Joseph reviendrait en Bretagne , nul n’y avait jamais vraiment cru.
Joseph n’a jamais caché sa volonté de rester en Haiti jusqu’au bout…mais pour autant, il
restait présent pour sa famille, notamment grace à son goût pour les nouvelles
technologies qui en faisait d’ailleurs le spécialiste de l’informatique pour toutes les écoles
des frères d’Haiti. Chacun pouvait lui demander nouvelles et conseils par mail, il restait au
plus près des préoccupations de ses proches, en dépit de la distance et de ses propres
problèmes. Les notres auraient pu lui paraître bien dérisoires à côté des tourments d’Haiti :
instabilité politique, crises économiques et financières, émeutes, enlèvements de religieux
français, cyclones…à chaque fois, nous frémissions en entendant les nouvelles d’Haiti car
lorsque des nouvelles arrivent jusqu’en France, elles sont toujours inquiétantes. Il
s’empressait de nous rassurer sans jamais s’apitoyer sur son sort lors de ces évènements
difficiles traversés au côté du peuple haitien. Il aura partagé le destin de ce peuple jusqu’à
son plus grand drame survenu il y a bientôt deux semaines.
Pour nous, neveux et nièces, Joseph c’était l’oncle d’Amérique, un oncle d’Amérique dont
la vrai richesse était celle de l’âme. Nous savons, Joseph, que tu es toujours avec nous
dans nos coeurs pour nous donner force et courage, comme avant, tu es juste un peu plus
loin qu’avant…
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